Wednesday, August 1, 2012: 3:00 PM
Faculty of Economics, TBA
Anne BORY
,
Institut de Sociologie et d'Anthropologie, Université Lille I, Clersé, Villeneuve d'Ascq, France
Pierre BARRON
,
Université Paris VIII, France
Sébastien CHAUVIN
,
Department of Sociology and Anthropology, University of Amsterdam, Netherlands
Nicolas JOUNIN
,
Université Paris VIII, CSU-CRESPPA, France
Lucie TOURETTE
,
indép., France
Les grèves de travailleurs sans papiers qui ont mobilisé plusieurs milliers de personnes en Ile-de-France entre avril 2008 et octobre 2010 ont marqué une étape inédite de l'action syndicale française. D'abord parce que ces grèves ont allié la revendication traditionnelle du mouvement des sans-papiers – la régularisation – et un mode d'action propre au mouvement ouvrier, mais rarement mobilisé depuis le début des années 1980 – la grève avec occupation du lieu de travail. Au-delà de la visibilité qu'elles ont donné à des travailleurs souvent camouflés, malgré leur présence massive dans les secteurs du bâtiment, du nettoyage, de la restauration, de l'aide à la personne, elles ont également été les premières grèves coordonnées concernant ces secteurs, et plus largement des PME, le secteur de l'intérim et le travail au noir.
Ces grèves comportent des enjeux déterminants pour le syndicalisme, particulièrement en termes de démocratisation. Au fil des mois de grèves, plusieurs milliers de travailleurs sans papiers, majoritairement africains, ont découvert l'action syndicale, le fonctionnement des organisations de salariés, et des pans entiers du droit du travail. Plusieurs centaines ont appris à négocier avec leurs employeurs, à revendiquer leurs droits, à organiser une mobilisation collective. Pour autant, la direction du mouvement est restée l'affaire de permanents syndicaux français. Cet enjeu de démocratisation du mouvement a été et demeure essentiel pour l'analyse sociologique et la réflexion syndicale.
Enfin, le pari des syndicats était qu’au-delà de la revendication de régularisation, ces grèves ouvriraient les espaces productifs occupés par les sans-papiers à l'action syndicale, notamment grâce à la syndicalisation des grévistes. Nous examinerons ce qu'il en est, un an et demi après la fin des dernières grèves.
Cette communication s'appuiera sur une enquête ethnographique collective menée depuis février 2008, et discutera les constats empiriques français au regard d'autres expériences de syndicalisation de travailleurs étrangers.