107.1 La spécialisation des modes de prise en charge de la maladie d'alzheimer en France : Entre levier d'évolution des carrières professionnelles, désinsertion sociale des patients et renforcement de la stigmatisation

Wednesday, August 1, 2012: 12:30 PM
Faculty of Economics, TBA
Oral Presentation
Lucie LECHEVALIER HURARD , UFR Santé, Médecine, Biologie Humaine, Université Paris 13, Bobigny , France
Depuis le début des années 2000, les politiques publiques françaises en direction des personnes âgées ont entériné une approche médicalisée des modes de prise en charge, qui avaient été tournés depuis les années 1960 vers une préoccupation sociale liée aux modes de vie. Ce mouvement de médicalisation se traduit par exemple par des plans gouvernementaux de santé publique visant la maladie d'Alzheimer. Le troisième « Plan Alzheimer » (2008-2012) encourage la création de structures spécialisées d'accueil des « malades d'Alzheimer ». Nous proposons de réfléchir aux diverses implications de cette spécialisation et de l'absence de mixité des populations qu'elle induit, à trois niveaux :
  • Du côté des professionnels : elle pose la double question du développement de compétences nouvelles, qui peuvent servir de support à des évolutions de carrières pour des soignants qui sont physiquement usés, et en contrepoint, du fardeau de la spécialisation dans des structures qui développent une approche sécuritaire que les soignants peuvent percevoir comme dissonante par rapport au mandat de soin structurant leurs identités professionnelles
  • Du point de vue des patients : la concentration dans des structures spécialisées de personnes présentant toutes des « troubles du comportement » suppose la création d'espaces où les normes sociales ordinaires ne s'appliquent plus. La suppression de la mixité va donc dans le sens inverse des politiques de maintien des personnes âgées dans leur environnement social, censé favoriser leur maintien en santé. On voit apparaître deux vieillesses : celle qui a droit à l'intégration sociale et celle qui en est définitivement exclue de par la réduction à un statut biologique pathologique.
  • Du point de vue des représentations sociales : la spécialisation des structures d'accueil renforce la performativité de la catégorie « maladie d'Alzheimer », stigmatisante et excluante, alors même que l'élaboration du diagnostic fait encore l'objet de nombreuses controverses scientifiques.