Dreams, Imagination and the Possibles
Dans notre monde contemporain, dur et fataliste, la question se pose de savoir si « la flamme éternelle » du désir d’une autre vie dans un autre monde, d’une vie meilleure, d’une vie fondée sur le dépassement de nos manques n’est pas éteinte. L’imagination aurait ainsi perdu son caractère transcendant. Elle n’ébaucherait plus l’avenir possible. Dans ce cas, à côté de l’obligation de subir et de s’adapter aux hétéronomies qui façonnent notre vie pourraient exister des rêves, peut-être éternels, comme phénomènes psychiques, comme « rêveries » (Rousseau) et comme fuite de la réalité - trop dure pour les humains - dans des fantaisies.
Le rêve est, grâce à sa qualité transcendante, lié à l’imagination, à notre faculté de penser ce qui n’existe pas (encore). L’imagination n’est pas le contraire de la raison, comme il est de bon ton de le dire depuis les Lumières ; elle n’est pas non plus une fantaisie. Elle met à notre disposition des images d’un monde possible. Cependant, l’industrie culturelle en général et ses formes récentes en particulier mobilisent l’imagination et des images pour reproduire et moderniser le monde existant et pour engager les humains dans ce projet et le leur imposer, si possible comme une nouvelle servitude volontaire. C’est pour cette raison que les images, de plus en plus virtuelles, et les mises en spectacle sont omniprésentes et que les acteurs ont de moins en moins de prise sur le réel. Ne nous reste-t-il que la « distraction systématique » (Rousseau) du spectacle, son « détournement » (Debord) ou quelques « lignes de fuite » (Deleuze) ?