De Quoi La Criet Est-Elle Le Nom ? État De Droit Et Droit De l’État Au Bénin

Friday, 11 July 2025: 11:15
Location: SJES025 (Faculty of Legal, Economic, and Social Sciences (JES))
Oral Presentation
Pauline JARROUX, Université libre de Bruxelles, Belgium
C’est en 2018 qu’a été créée la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET), qui siège désormais à Cotonou, au Bénin.

Cette juridiction spéciale, largement mieux dotée en moyens matériels que les tribunaux de droit commun du pays, est présentée comme répondant aux besoins d’une justice efficace et transparente, et aux enjeux des « nouvelles criminalités » (terrorisme, blanchiment de capitaux, cybercriminalité etc.) auxquelles le Bénin est désormais confronté.

Si elle est réputée pour la dureté de ses décisions, elle est aussi critiquée dans le pays pour sa « politisation », en écho à certaines affaires qui y ont été jugées, impliquant des opposants politiques ou, au contraire, des proches du pouvoir. Son installation a, pour de nombreux observateurs et analystes, confirmé le constat du « tournant autoritaire » pris par le pays, à la suite de l’élection en 2016 du Président Patrice Talon.

Ma communication vise à interroger ce que signifie, pour le personnel et les professionnels du droit et de la justice, travailler à la CRIET, alors que le pays était jusqu’ici loué pour la vitalité de sa démocratie. Quelle forme y prend, et où se loge le « tournant autoritaire » ?

Dans le travail quotidien, le respect des normes, la probité des magistrats, l’accueil des justiciables, sont mis en avant comme des éléments distinctifs du fonctionnement de la juridiction. Le procureur et ses substituts, mes principaux interlocuteurs au cours de mes dix premières semaines d’enquête, sont eux aussi soucieux du respect des procédures. L’interventionnisme politique y serait, en somme, localisé, circonscrit, de l’ordre de l’exceptionnel. Cette grille de lecture est-elle pertinente ? Que permet-elle de dévoiler, ou au contraire d’obscurcir, à propos du fonctionnement quotidien du droit et de la justice dans un régime « illibéral » ?