Travail Social Et "Anxiétés De L'attachement" Dans L'accompagnement Des Personnes Exilées En France

Wednesday, 9 July 2025: 14:30
Location: SJES026 (Faculty of Legal, Economic, and Social Sciences (JES))
Oral Presentation
Lucie LEPOUTRE LEPOUTRE, EHESS / Centre Maurice Halbwachs, France
A partir de l'intervention des acteurs associatifs auprès des demandeurs d'asile en France, cette communication propose de penser le travail social sous l'angle de la théorie de l'attachement social. Cette perspective offre une manière innovante de penser l'accompagnement comme un lien social en lui même. Cela implique de l’analyser, comme l’a conceptualisé Serge Paugam, au regard de deux dimensions : La protection, qui peut être résumée par l’expression « compter sur », est la dimension du lien social qui permet de faire face aux aléas de la vie. La reconnaissance, « compter pour », est la valorisation que l’individu retire du lien. Elle joue un rôle fondamental dans la construction d’une identité positive.

A partir de ces deux composantes du lien social, différentes configurations ont été mises en avant par Serge Paugam. La rupture des liens sociaux se caractérise lorsqu’il n’y a ni protection ni reconnaissance. Le lien social est au contraire « libérateur » lorsque les deux dimensions sont réunies. Lorsque le lien n’apporte pas (ou pas suffisamment) de protection, il est considéré comme fragilisé. Lorsque le lien apporte protection, mais pas de reconnaissance, il est considéré comme « oppressant ». Ces situations de rupture, d’oppression ou de fragilisation constituent des « anxiétés de l’attachement », en ce qu’elles produisent chez l’individu une expérience négative des rapports sociaux.

La configuration idéale de l’accompagnement, pour les personnes exilées, peut alors être définie comme la combinaison réussie de ces deux dimensions. Le cadre politique, social et associatif de l’accompagnement donne-t-il cependant les conditions de ce double objectif ? Cette communication analyse, à partir de cas concrets, les limites du développement de ces deux dimensions dans l'accompagnement social des personnes exilées en France. Elle est fondée sur un travail doctoral, combinant 3 années d'observation ethnographique, 98 entretiens et une enquête par questionnaire.