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Le Théâtre Public Français Entre 1950 Et 1980 : Art Engagé Contre Théâtre Commercial Au Risque De L'institutionnalisation

Tuesday, 12 July 2016: 11:30
Location: Hörsaal 14 (Juridicum)
Oral Presentation
Marjorie GLAS, IRIS / EHESS, France
La catégorie du théâtre « public » (ie subventionné par les pouvoirs publics), s’est constituée en France à partir des années 1950 en opposition à un théâtre privé accusé de dérive mercantiliste. Le théâtre public se construit sur deux principes centraux : l’innovation est posée comme un critère déterminant de consécration, en même temps que l’engagement politique constitue à partir des années 1970 le devoir de tout metteur en scène œuvrant au sein du théâtre public. Se constitue ainsi entre 1950 et 1980 l’idéal-type d’un théâtre « de création » émancipateur.

A la faveur d’un contexte politique et social spécifique (période de reconstruction après-guerre dans un contexte de forte politisation des débats avec la décolonisation et les luttes sociales), cette nouvelle catégorie fait émerger des critères de consécration en tous points opposés à ceux du théâtre privé : les agents en présence (metteurs en scène et « animateurs » chargés de l’action culturelle) défendent une radicalité esthétique formelle tout en développant les principes d’un art engagé à destination du public populaire en opposition au public bourgeois ; l’objectif du théâtre public est l’émancipation de la population, ce qui requiert un travail sur la totalité du territoire national (zones rurales, banlieues des grandes villes) opposé à la centralisation parisienne du théâtre privé.

Ce processus d’autonomisation du théâtre public va s’adosser à des financements publics provenant de l’Etat puis des pouvoirs locaux. A partir des années 1970, l’Etat va mettre en place un système de subventionnement qui tiendra peu à peu lieu de système de consécration artistique, au détriment d’une reconnaissance par les pairs. Cette communication, appuyée sur le terrain d’une thèse en cours (soutenance printemps 2016), veut montrer comment la revendication d’autonomie d’un art pur face au théâtre commercial s’est finalement soldée par la constitution d’une catégorie fortement institutionnalisée, dont les logiques échappent aujourd’hui aux acteurs qui l’ont fondée.