Sans Statut, Sans Droits ? Construire Un Droit International De La Reconnaissance Pour Le Sud Global

Tuesday, 8 July 2025: 10:00
Location: SJES005 (Faculty of Legal, Economic, and Social Sciences (JES))
Oral Presentation
Leila DRIF, Maison des Sciences de l'Homme du Pacifique UAR 2503 CNRS | University of french Polynesia, French Polynesia, Institut Convergence Migration, France
Au-delà de sa dimension instrumentale de régulation sociale, le droit exerce une fonction anthropologique « d’institution de l’humain », en favorisant le « faire société » (Ost, 2016 :97). Ce cadre commun repose sur des modes de reconnaissance institutionnels donnant accès à des droits socio-économiques et politiques (Fraser,2011) aux individus, via l'attribution d'un statut. Comment, dès lors, les personnes ne bénéficiant pas de la reconnaissance institutionnelle d’un statut, qu’il soit politique (réfugié), administratif-(bénéficiaire/ayant-droit d’une institution), ou socio-professionnel-(travailleur non déclaré, bénévole, ou personne exerçant une activité non reconnue comme un travail)-, font-elles pour se faire reconnaître des droits et accéder aux ressources leur permettant de subvenir à leurs besoins ?

Cette communication vise à réfléchir aux conditions d’émergence d’un « droit international de la reconnaissance » (Jouannet, 2011) comme instrument juridique d’intégration des espaces sociaux marginalisés et subalternes, dans le Sud global. Elle défend l'hypothèse d'une humanitarisation des droits sociaux et économiques, s'agissant des personnes exclues des cadres normatifs de reconnaissance statutaire définis par les institutions. Cet essai de théorisation s’appuie sur la mise en dialogue de trois études de cas empiriques, fondées sur l’expérience anthropologique de sujets privés de la jouissance de leurs droits faute de reconnaissance institutionnelle : au Liban, le cas des réfugiés syriens, que le gouvernement libanais ne reconnait pas comme réfugiés ; en France, le cas des déboutés de l’asile issus des Suds, qui sont exclus du droit de séjour et du travail, et en Polynésie française, l’exemple des personnes dont l’activité économique de subsistance n’est pas reconnue sur le marché du travail.